Article sélectionné dans
La Matinale du 14/06/2017 Découvrir l’application
Le roman vrai de la famille Brontë
La correspondance choisie des sœurs écrivaines, Charlotte (« Jane Eyre »), Emily (« Les Hauts de Hurlevent ») et Anne (« Agnès Grey »), de leur père et de leur frère, enfin traduite, fascine. La romancière Christine Jordis l’a lue.
Le Monde | 14.06.2017 à 16h37 • Mis Ă jour le 15.06.2017 à 07h24 | Par Christine Jordis (écrivaine)
« Lettres choisies de la famille Brontë (1821-1855) », traduit de l’anglais par Constance Lacroix, Quai Voltaire, 624 pages, 25 €.
« On ne devrait jamais conserver de lettres comme les miennes – elles sont aussi dangereuses que des allumettes Lucifer… Jetez-les au feu. » Cette consigne, ironique, Charlotte Brontë (1816-1855) la tient de son mari, le prudent vicaire Arthur Nicholls, et elle la transmet à son amie, Ellen Nussey, destinataire de la plus grande partie de ses missives.
Arthur Nicholls ne s’y trompe pas. Charlotte écrit ce qu’elle pense, soucieuse avant tout de vérité, quitte à déranger quelques idées reçues. Cette exigence implacable fait de ces Lettres choisies de la famille Brontë, où sa voix prédomine, un roman aussi fascinant que l’œuvre de la fratrie.
Il s’agit de quelque trois cents lettres Ă©crites de 1821, quand meurt Maria, la mère, Ă 1855, annĂ©e de la mort de Charlotte, et sĂ©lectionnĂ©es parmi un millier environ. Elles n’avaient pour la plupart jamais Ă©tĂ© publiĂ©es en France, ce dont on peut s’étonner devant l’intĂ©rĂŞt des dĂ©couvertes qu’elles nous font faire sur leurs auteurs. sur le père, le rĂ©vĂ©rend ÂPatrick BrontĂ« ; Emily, dont subsistent quelques billets laconiques ; Branwell, le frère, beau et douĂ©, l’espoir de la famille, qui nourrit de hautes ambitions littĂ©raires, Ă©crit Ă Wordsworth, se trompe dans ses amours, boit, se drogue et meurt en quelques jours après avoir secouĂ© le presbytère de ses scènes ; Anne, la plus jeune, la plus douce, qui n’était pas taillĂ©e pour ce monde ; Charlotte, enfin, dont les lettres constituent une plongĂ©e dans une vie d’austĂ©ritĂ©, de privations, de solitude, parfois d’exaltation, et donnent aussi de vivants portraits des Ă©crivains de l’époque, Thackeray, Miss Martineau, Mrs Gaskell, son amie…
Charlotte, intensément vivante
On voit Charlotte « placée », gouvernante pour la première fois, chez des « gens orgueilleux.
L’accès à la totalité de l’article est protégé Déjà abonné. Identifiez-vous
Le roman vrai de la famille Brontë
Il vous reste 66% de l'article Ă lire